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Auguste BILLARD PERRIN
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Photographe d'atelier
1 photographie
L'Aigle Orne Pau Pyrénées-Atlantiques
Auguste Eugène Billard (date et lieu de naissance inconnus) avait épousé Henriette Euphrasie Perrin, née le 5 décembre 1833 à Montauban (Tarn-et-Garonne). Sous le nom de Billard Perrin, "artiste peintre et photographe", il a exercé à Pau (Pyrénées-Atlantiques) à partir de 1862 environ puis à L’Aigle (Orne) durant les premières années 1880.
PAU : Dans cette ville, sous le Second Empire, Billard Perrin aurait pu n’être qu’un photographe moyen parmi d’autres. Ce ne sont pas les notables palois qui fréquentaient son atelier qui ont fait sa notoriété mais une modeste jeune fille de Lourdes, Bernadette Soubirous.
Images de dévotion : "un commerce considérable".
Le 11 février 1858, Bernadette Soubirous, âgée de 14 ans, déclare que la Vierge Marie lui est apparue dans la grotte de Massabielle à Lourdes. Cette première apparition sera suivie de dix-sept autres dans les semaines qui suivent. Une foule de plus en plus nombreuse accompagne Bernadette devant la grotte. Lourdes devient bientôt un lieu de pèlerinage. Chacun veut conserver un souvenir de son passage, notamment un portrait de Bernadette. Les premiers auraient été faits par l’abbé Bernadou. (1) Ils sont commercialisés par l’éditeur tarbais Dufour qui ouvre une succursale à Lourdes en 1863. Conformément à la convention passée avec Monseigneur Laurence, évêque de Tarbes, une partie des bénéfices sert à financer les oeuvres religieuses. Au mois d’octobre 1863, Billard Perrin obtient du même évêque le droit de photographier Bernadette. Il vend ses portraits avec au dos la mention "seul autorisé par Mgr l’évêque de Tarbes pour la vente & la publication du Portrait de Bernadette Soubirous et tout ce qui se rattache à l’apparition de la Sainte Vierge à la grotte de Lourdes". Mécontent d’avoir perdu son monopole, Dufour fera à nouveau poser Bernadette en février 1864. D’autres photographes feront commerce de ces images de dévotion notamment Viron qui exerçait à Lourdes et Provost de Toulouse. En 1874, à Paris, M. Letaille, utilise un portrait de Bernadette qu’il a réduit pour le fixer au dos des images de dévotion qu’il met en vente. Billard Perrin, auteur du portrait, saisit la justice pour défendre son droit de propriété sur des images dont il fait "un commerce considérable". Le 28 août 1874, la 3e chambre du tribunal civil de la Seine condamne Letaille à verser 500 francs au photographe. (2) Billard Perrin reste à Pau jusqu’à la fin des années 1870 avant de s’installer à L’Aigle (Orne). Pourquoi un photographe bien installé dans la préfecture des Basses-Pyrénées qui comptait alors 29 000 habitants l’a-t-il quittée pour un chef-lieu de canton de l’Orne peuplé de 5 300 âmes ? La source de revenus que lui procuraient les portraits de Bernadette Soubirous s’était-elle tarie ?
L'AIGLE . Le photographe s’y serait installé durant l’hiver 1879-1880 "Le Journal d’Alençon" daté du 18 mai 1880 le qualifie de "photographe nomade... établi autrefois à Pau et emménagé depuis plusieurs mois au château de Laigle où il s’est fait construire un atelier en planches sur la terrasse qui regarde la place Saint-Martin".
Un chantage odieux.
C’est ce "photographe nomade" qui est chargé par la vicomtesse du Souchey de faire un portrait post mortem de son mari qui s’était fracturé le crâne en tombant de son cheval. Le photographe quand il livre le portrait en demande un prix exorbitant : 500 francs soit dix fois ce qu’il valait. La vicomtesse ne lui accorde que 200 francs, ce qui est déjà beaucoup mais pas assez pour Perrin qui exige ses 500 francs. Le 8 mai 1880, il adresse à madame du Souchey une lettre stupéfiante par laquelle il la menace, faute d’un paiement intégral de la somme qu’il réclame, d’exposer dans sa boutique le portrait du défunt avec un écriteau portant ses mots "En prison pour dettes". Ce n’était pas qu’une odieuse plaisanterie. Billard Perrin met sa menace à exécution. Le dimanche suivant, en sortant de la grand messe de onze heures, les paroissiens effarés découvrent dans la vitrine du photographe le portrait du mort placé derrière un treillage métallique évoquant les barreaux d’une prison et au-dessus l’écriteau infamant "En prison pour dettes". Face aux menaces d’un groupe d’ouvriers qui s’apprêtent à tout démolir, Billard Perrin retire le portrait. De son côté, la vicomtesse saisit la justice. (3) Billard Perrin, qui s’est placé de lui même dans une position intenable, est contraint de faire amende honorable. Le 1er juin, il adresse à Mme du Souchey une piteuse lettre d’excuses "Sous l’influence des mauvais conseils et cédant à un mouvement que je déplore profondément, je me suis rendu coupable d’un acte injurieux envers vous et votre famille. Vous avez intenté contre moi à ce sujet une juste poursuite ; et je viens vous supplier de l’abandonner... Je vous conjure d’oublier un outrage qui n’a pu vous atteindre et dont la publicité que vous pourrez donner à cette lettre sera une réparation publique". Après la publication de cette lettre dans "Le Journal d’Alençon" du 1er juillet 1880, la vicomtesse du Souchey se désiste de son action en justice. (4) Cette lamentable affaire aurait dû pousser Billard Perrin à s’éloigner rapidement de l’Orne. Pourtant, il est toujours recensé à L’Aigle en 1881. Dans l’Annuaire départemental de 1884, il est répertorié comme photographe à Mortagne. (5)
Après, il y a un blanc d’une dizaine d’années dans sa biographie. En 1896, lui et sa femme sont recensés à La Rochelle où son épouse décèdera le 18 janvier 1900. Bien qu’il se déclare "artiste photographe", rien n’indique que Billard Perrin, âgé de 69 ans, ait eu une activité de photographe en Charente-Maritime. La date et le lieu de son décès ne sont pas connus.
Sources :
(1) Bernard Billet "Bernadette, une vocation pour tout le monde" (2008)
(2) Gallica - "La Gazette des tribunaux " du 25 octobre 1874.
(3) Normannia - "Le Journal d’Alençon" du 18 mai 1880.
(4) Normannia - "Le Journal d’Alençon" du 1er juillet 1880.
(5) "Images révélées - 150 ans de photographies aux Archives de l’Orne" (2007)