Charles GALLOT

(1838-1919)
Photographe d'atelier
13 photographies

Cherbourg Manche Paris Seine

Charles Auguste Gallot est né le 9 avril 1838 à Cherbourg (Manche). Il n’a pas 7 ans quand son père, commissaire principal de marine, décède en 1845 laissant une veuve et trois enfants. Elève boursier, Charles peut poursuivre ses études au collège de Cherbourg (1).

CHERBOURG : A l’âge de 24 ans, en mars 1862, il reprend la librairie de la dame Ribet (2). Comme d’autres libraires sous le Second Empire, il s’intéresse à la photographie et ouvre un atelier rue Tour carrée pendant que sa mère et sa soeur gèrent la librairie. En février 1865, il propose à ses clients des photographies du steamer "Iowa" avec les appareils de sauvetage dressés par l’ingénieur Horn (3). Ce bateau avait fait naufrage devant La Hague le 6 décembre 1864. Gallot, "ne voulant s’occuper que de sa photographie" met en vente la librairie en mars 1865 (4). Un mois plus tard, sa soeur, Angela Gallot, épouse le photographe Jules Bréchet. Le mois suivant, le 18 mai 1865, c’est au tour de Charles Gallot d’épouser Blanche Bréchet, soeur de Jules. Les deux beaux-frères ne se feront pas concurrence à Cherbourg. Bréchet poursuivra sa carrière à Lisieux puis à Caen. De son côté, Charles Gallot va vivre un moment difficile : le tribunal de commerce, le 10 août 1866, le déclare en faillite. L’annonce en est faite par "La Vigie de Cherbourg" mais dans le même journal, Gallot précise que "les ateliers de photographie de la rue de la Fontaine, seront ouverts le jeudi 16 courant". (5) En février 1868, la situation est rétablie, si bien que le photographe doit passer une annonce pour recruter deux opérateurs de photographie "dont l’un pour le cliché et parfaitement au courant du travail, l’autre pour le tirage". (6) On ne sait jusqu’à quand Gallot a été actif à Cherbourg (7) avant de poursuivre sa carrière à Paris.

PARIS : Le 7 septembre 1872, Charles Auguste Gallot, photographe, demeurant 222, rue Saint-Antoine à Paris (8) est témoin au mariage de sa belle-sœur Eléonore Bréchet avec Léon Lefrançois, employé. Dans les mois qui suivent, Gallot ouvre deux ateliers dans la capitale :
- 1, boulevard Beaumarchais, ce sera son établissement principal ;
- 3, boulevard Bonne-Nouvelle, où il succède à Alphonse Pestel, (9)
Les deux ateliers étant distants de 3,5 kilomètres, c’est Léon Lefrançois qui opérera boulevard Bonne-Nouvelle pour le compte de son beau-frère.
CHARLES
Pendant peut-être une douzaine d’années, les portraits faits dans les deux ateliers seront signés Charles. (10) A une date qui reste à préciser, Gallot cède à son beau-frère l’atelier du boulevard Bonne-Nouvelle où Lefrançois opèrera sous le nom de France.

CHARLES GALLOT
Désormais, les portraits faits boulevard Beaumarchais seront signés Charles Gallot. L’année 1885, sera une année importante pour lui. Le 12 avril, un ami le conduit dans la maison où Victor Hugo vit ses derniers jours. (11) Gallot fait un beau portrait du poète, moins connu que le post mortem signé Nadar. En 1885, Gallot participe à l’exposition universelle d’Anvers et à l’exposition internationale du travail qui se tient à Paris. Il obtient des médailles qu’il ne manquera pas d’afficher au dos de ses portraits. En décembre 1885, « Le Moniteur de la Photographie » rend compte de l’exposition parisienne : « … le jury a examiné avec intérêt le travail difficile auquel s’est livré M. Gallot qui a réuni en cartes-cabinet toutes les célébrités : hommes de lettres, des arts, etc., etc. Il y a là une oeuvre tout à fait importante que M. Gallot a d’ailleurs fait reproduire au complet par la woodburytypie. » (12). Gallot réunira en albums ses portraits de « Personnalités contemporaines » parmi lesquelles Ferdinand de Lesseps, Eugène Labiche, Francisque Sarcey et bien sûr Victor Hugo. Chaque photographie était complétée par une notice biographique (13) A la fin du XIXe siècle, Charles Gallot peut se prévaloir d’être le photographe de la Société des gens de lettres mais aussi celui de l’Académie française et de l’Académie des beaux-arts. (14)
L’atelier du boulevard Beaumarchais n’accueillait pas que des gens en vue. Le 9 novembre 1889, quelques jours après sa sortie de l’école militaire de Saint-Cyr, Louis Anastay vient poser en uniforme chez Gallot. (15) Le photographe ne pouvait imaginer que le beau militaire deux ans plus tard assassinerait la baronne Dellard pour la voler. En garnison à Lyon, Anastay entretenait plusieurs maîtresses dont une danseuse espagnole. Il avait besoin de 1 800 francs et était prêt à tout pour rembourser ses dettes. Cela le conduisit à l’échafaud à l’âge de 26 ans. Un autre client de Gallot, beaucoup moins fringant, fut condamné à la peine capitale bien qu’il n’eût tué personne. Le 2 décembre 1893, Auguste Vaillant, "vêtu fort misérablement" se présente boulevard Beaumarchais et est reçu par l’employé principal de l’atelier qui fait son portrait. Vaillant paye 8 francs pour une douzaine de portraits "carte de visite" plus une carte album. Il revient le 9 décembre récupérer les photos. Le jour même, il envoie la carte album et cinq photos plus petites à sa maîtresse. (16) Il part ensuite au Palais-Bourbon où siègent les députés. Vers 16 heures, pendant la séance, il jette une bombe artisanale chargée de morceaux de zinc et de plomb qui va blesser une cinquantaine de personnes. Arrêté, Vaillant est condamné à mort. Il sera exécuté le 5 février 1894.
Après avoir été photographe pendant une trentaine d’années, Charles Gallot prend du recul. En août 1898, il cède son atelier du boulevard Beaumarchais, équipé depuis plusieurs années de la lumière électrique, à Charles Legendre et Stanislas (Zwierzynski). (17) Ce n’est pas, une retraite complète. En janvier 1904, il est fait officier de l’instruction publique. (18) Or la photo ci-dessous d’un couple porte la signature Gallot suivie des Palmes académiques. Le photographe sexagénaire a donc fait des portraits, pendant une brève période, dans un atelier situé 18, rue Dauphine. Il pourrait aussi être l’auteur de quelques cartes postales de Granville (Manche) qui sont signées Gallot. (19)
Charles Gallot avait été honoré des Palmes académiques en tant que « photographe et homme de lettres ». Il était aussi musicien. Entre autres, il avait composé deux polkas : "Collodion" ou polka des photographes et "La Cingalaise", polka pour xylophone qui, selon "La Vigie de Cherbourg" datée du 16 avril 1891, "obtient en ce moment un grand succès dans un des cafés chantants des boulevards parisiens".

Rentier, Charles Auguste Gallot est décédé le 12 décembre 1919 à Tours (Indre-et-Loire).

Notes et sources :
(1) "Le Journal de Cherbourg" du 20 novembre 1853. Consultable en ligne sur le site des Archives départementales de la Manche.
(2) "La Vigie de Cherbourg" du 13 avril 1862. Consultable en ligne sur le site des Archives départementales de la Manche.
(3) "La Vigie de Cherbourg" du 16 février 1865.Voir supra.
(4) "La Vigie de Cherbourg" du 16 mars 1865. Voir supra.
(5) "La Vigie de Cherbourg" du 12 août 1866. Voir supra.
(6) "La Vigie de Cherbourg" du 16 février 1868.Voir supra.
(7) Selon la liste des photographes de la Manche consultable sur wikimanche, Gallot aurait été actif à Cherbourg jusqu’en 1870.
(8). En 1886, Germain Blanc était photographe 222, rue Saint-Antoine avec un salon de pose au 1er étage.
(9) Alphonse Pestel, artiste peintre et photographe, avait longtemps travaillé 3, boulevard Bonne-Nouvelle à l’enseigne « Photographie de la Porte-Saint-Denis ». Il y aurait été actif jusqu’en 1872 ou 1873. Il poursuivra sa carrière à Elbeuf (Seine-Maritime) où il est recensé en 1876.
(10) Au dos de quelques portraits signés Charles, seul l’atelier du boulevard Beaumarchais est mentionné.
(11) Gallica - "Le Figaro" du 17 mai 1930.
(12) Gallica « Le Moniteur de la Photographie » du 15 décembre 1885.
(13) Les deux premiers volumes sont publiés en 1884, le troisième en 1885. Chaque album contenait 25 portraits (BnF Catalogue général – notice bibliographique).
(14) A partir de 1888, l’année de la prise de vue est imprimée au dos des portraits de Gallot. De 1888 à 1892, il se présente comme le photographe des Gens de lettres, de l’Académie française et de l’Académie des beaux-arts. A partir de 1896, année où il commence à opérer à la lumière électrique, il n’est plus fait mention que de la Société des gens de lettres.
(15) Gallica - "La Lanterne" du 1er janvier 1892.
(16) Gallica - "Le Temps" des 14 et 18 décembre 1893.
(17) Gallica - "Archives commerciales de la France" du 6 août 1898.
(18) Gallica « Journal officiel de la République française » du 4 janvier 1904.
(19) Yves Lebrec - "Les premiers photographes de Granville 1839-1939"
Notice mise à jour le 15 août 2024.