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Léon RANDON
(1859-1902)
Photographe d'atelier
1 photographie
Léon Randon est né le 17 avril 1859 à Paris, fils de Gilbert Randon et de Lucile Perrotin. Son acte de naissance, tardivement reconstitué en décembre 1879, ne nous dit pas quel métier exerçait son père. Pourtant, impossible d’esquisser un portrait de Léon Randon en faisant l’impasse sur Gilbert.
Fils d’un perruquier, Gilbert Randon est né à Lyon en 1811. (1) Il est un cousin de Félix Tournachon dit Nadar. (2) Encore adolescent, Gilbert s’engage dans un régiment de cavalerie. A ce titre, à la fin de sa vie, il percevra une pension comme ancien sous-officier. Après avoir quitté l’armée, Gilbert Randon est dessinateur à Lyon. Selon Nadar, son cousin y aurait pratiqué le daguerréotype entre 1842 et 1848. Cette activité est attestée au printemps 1843. Dans « Le Journal du commerce de la ville de Lyon et du département du Rhône » G. Randon annonce qu’il fait des portraits au daguerréotype tous les jours sur la terrasse du 2, rue Petit-David. (3) Pourtant ce n’est pas le photographe que Félix Tournachon fait venir à Paris en 1851 mais bien le dessinateur. Avant de devenir un grand photographe, Nadar gagnait sa vie en dessinant des caricatures publiées dans « Le Journal pour rire ». Parrainé par son cousin, Gilbert Randon devienra un collaborateur attitré du « Journal du rire » puis du « Journal amusant ». Il y côtoiera Gustave Doré et le futur photographe Bertall.
Léon Randon est dans sa quinzième année quand il est reconnu et légitimé par ses parents qui se marie le 18 février 1864 à la mairie du 16e arrondissement. A quelques jours près, ce n’est pas un enfant que Gilbert Randon et Lucile Perrotin auraient légitimé mais deux. Le 8 mars 1864, dix-neuf jours après son mariage, Lucile Randon, âgée de 40 ans, met au monde une fille prénommée Alice Thérèse. Le caricaturiste a désormais deux enfants à sa charge. Ce n’était peut-être pas un gros souci en 1864 ; cela le sera quand Gilbert Randon, paralysé de la langue et des bras ne pourra plus travailler. Le 6 juillet 1882 « La Justice », le journal de Georges Clémenceau, décrit "la situation des plus pénibles d’un artiste bien connu dont les caricatures dans « Le Journal amusant » et « Le Charivari » ont amusé bien des gens. Avant de tomber malade, il a eu à soigner sa femme et il a perdu sa sœur dans des circonstances particulièrement cruelles. Enfin, il avait à sa charge sa fille, aujourd’hui employée dans un magasin et son fils qui travaille dans un atelier de photographie. Randon n’a pour toutes ressources qu’une pension annuelle de 200 francs du ministère de la guerre et quelques secours intermittents du ministère des beaux-arts ». (4) En janvier 1883, habitant à Asnières, Gilbert Randon se rend à Paris pour remercier plusieurs de ses amis qui s’étaient intéressé à sa situation. En descendant de l’omnibus, il est renversé par un fiacre qui lui passe sur le corps. (5) Il survivra à cet accident mais mourra à l’hôpital Fernand-Widal le 30 mars 1884.
Léon Randon a 24 ans quand son père décède. Cela fait déjà pas mal d’années qu’il gagne sa vie en travaillant dans les ateliers de la capitale. Chez Nadar ? Peut-être mais il n’en fera jamais mention. Quand sa sœur Alice, domiciliée 17, rue Saint-Martin, se marie le 3 octobre 1888, elle a pour témoin le photographe Aron Gerschel qui avait son atelier dans le même immeuble. Il serait surprenant que Léon Randon n’y ait pas travaillé. Il attendra encore deux ans avant de passer du statut d’employé à celui de patron. Et ce n’est pas à Paris mais à Rouen (Seine-Maritime) qu’il tentera sa chance.
ROUEN : Le 26 juin 1890, Léon Randon crée avec Paul Colette une société pour exploiter un fonds de photographie 23, quai de Paris à Rouen. Le capital de la société est de 20 000 francs. Randon n’était pas en mesure de réunir une telle somme d’où son association avec Colette qui n’était pas photographe de formation. Moins d’un an après sa création, la société est dissoute. (6) Pendant cinq ans Randon travaille seul. Au printemps 1896, il s’est trouvé un nouvel associé, M. Mallet, avec lequel il crée la société en nom collectif Randon & Mallet. Cette société, au capital de 35 000 francs, qui devait durer quinze ans sera dissoute dès le 1er septembre 1899. (7)
Le 16 mai 1896, le ministre du commerce Henry Boucher et son collègue André Lebon, ministre des colonies, inaugurent l’exposition nationale et coloniale de Rouen. (8) Pendant cinq mois, elle accueillera 600 000 visiteurs. Une aubaine pour Léon Randon, dont l’atelier était situé pas loin de l’entrée de l’exposition. Il en sera en quelque sorte le photographe officiel. « Le Journal de l’Exposition nationale & coloniale de Rouen » publié chaque semaine est illustré de photographies signées L. Randon ou Randon & Mallet, notamment celle du Vieux-Rouen et du « village nègre ». Randon se devait de participer à cette exposition alors que ses confrères rouennais s’en dispensèrent. Le rédacteur du « Journal de l’Exposition » le déplore : « La section de photographie n’est représentée à l’Exposition que par un petit nombre d’exposants. A quoi faut-il attribuer ce peu d’empressement de la part de nos opérateurs rouennais ? Ont-ils craint la comparaison avec les maisons parisiennes ou est-ce un aveu d’impuissance et n’ont-ils rien trouvé dans leurs travaux qui fut digne d’intérêt ». (9) Il est vrai que parmi les « maisons parisiennes » qui s’étaient inscrites à l’exposition de Rouen, il y avait la plus célèbre d’entre elles celle de Nadar. Paul Nadar, le lointain cousin de Randon, poursuivait l’œuvre de son père. A Rouen, il exposait, entre autres, « un magnifique portrait de M. Félix Faure, qui est bien le plus parfait qui ait été fait du Président de la République ». (10) Randon avait lui sélectionné des portraits d’artistes « applaudis depuis plusieurs années au Théâtre des Arts » ainsi que celui du fameux recordman Charles Terront. (11) Ces portraits lui vaudront une médaille d’argent. Il en recevra une autre l’année suivante à Rennes. En 1898, c’est la consécration. Le jury de l’Exposition des arts photographiques de Rouen lui décerne une médaille d’or. Ensuite, Léon Randon ne participera plus aux expositions. Dans son atelier du quai de Paris, il continuera à faire des portraits, essentiellement ceux de soldats en garnison à Rouen.
Léon Randon est décédé le 2 octobre 1902 à l’âge de 43 ans. C’est Alphonse Lefranc qui lui a succédé.
Notes et sources :
(1) Wikipedia Notice de Gilbert Randon. https://fr.wikipedia.org/wiki/Gilbert_Randon
(2) La Bibliothèque nationale de France conserve au moins deux portraits de Gilbert Randon signés Nadar. A voir en ligne sur Gallica https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b53066081w/f1.item.zoom
(3) RetroNews - « Le Journal du commerce de la ville de Lyon et du département du Rhône » du 23 avril 1843.
(4) RetroNews - « La Justice » du 6 juillet 1882.
(5) RetroNews - « La Justice » du 26 janvier 1883.
(6) Gallica – « Archives commerciales de la France » des 9 août 1890 et 13 juin 1891.
(7) Gallica – « Archives commerciales de la France » des 25 avril 1896 et 28 octobre 1899.
(8) Gallica – « Journal de l’Exposition nationale & coloniale de Rouen » n°1.
(9) Gallica – « Journal de l’Exposition nationale & coloniale de Rouen » n°5.
(10) Gallica – « Journal de l’Exposition nationale & coloniale de Rouen « n°8.
(11) Charles Terront (1857-1932) coureur cycliste français. En 1891, il remporte en 71 heures le premier Paris-Brest-Paris après avoir passé trois nuits sur son vélocipède. Deux ans plus tard, sur la distance de 1 000 kilomètres, il bat Jean-Marie Corre devant 50 000 spectateurs. En 1893, il ouvre à Rouen un commerce de cycles et d’automobiles (source Wikipedia).